L’histoire de la création de Flaine est atypique dans le contexte de l’émergence des stations de l’époque et celle-ci participe largement à l’identité du projet.
Comme dans le cas de Courchevel ou des Deux-Alpes, on est bien en présence d’une maîtrise d’œuvre unique contrôlant l’ensemble du foncier et la gestion financière globale ainsi que d’une réflexion rationnelle de l’espace. Mais alors que les stations intégrées étaient en général promues par un groupement de personnes et / ou d’intérêts, Flaine est née de la volonté d’un couple de passionnés, Eric Boissonnas, géophysicien de formation, et sa femme Sylvie. Tous deux issus de familles fortunées, leurs moyens financiers sont pratiquement illimités. Passionnés d’art et d’architecture, ils passent quatorze ans aux Etats-Unis, où ils s’imprègnent définitivement de la modernité du pays.
Ils reviennent en France avec l’intention d’expérimenter au sein du milieu qui les passionne, la montagne, une nouvelle forme de villégiature ou l’art et le respect du milieu naturel seraient des principes fondateurs.
« J’avais été frappé de ce qu’il était, et est toujours, quoique dans une moindre mesure, plus facile outre atlantique de se familiariser avec la création contemporaine. En France, la révérence inspirée par les vestiges du passé, patinés par l’âge et ordonnés selon des compositions traditionnelles, nous éloigne des créations actuelles » ( E.Boissonnas ,1994).
« C’est ainsi que nous est venue l’idée en 1957, de créer quelque part en France, un prototype d’urbanisme, d’architecture et de design, pour lequel la rentabilité immédiate serait subordonnée aux choix esthétiques et au respect de l’environnement » (E.Boissonnas,1994).
L’identité de Flaine est donc clairement définie avant même les premières esquisses, elle se doit d’être un « chef d’œuvre ». Elle naît d’une démarche culturelle qui vise à concevoir un lieu unique où l’on viendra autant pour profiter de l’art que pour skier.
Dès le début, c’est une pensée et des choix esthétiques qui sont mis en avant. Une aspiration claire à un ordre architectural raisonné, les amènera naturellement à choisir un architecte unique pour l’ensemble du projet ; la question du budget quant à elle n’est pas de mise, une architecture trop utilitaire risquant d’altérer leurs vues visionnaires.
Après de multiples recherches, l’architecte suisse Gérard Chervaz et Eric Boissonnas découvrent lors d’une randonnée le vallon de Flainoz, au cœur du massif de L’Arve et du Giffre. Le site est exceptionnel, vierge et isolé : il semble d’emblée à la hauteur des ambitions des époux Boissonnas.
C’est le début de l’aventure, il n’y a pas de route d’accès, les politiques juridico- financières sont à inventer, les acteurs politiques et l’ensemble de la chaîne de décision administrative de l’époque sont à mobiliser.
Après de nombreuses péripéties les travaux commencent enfin, ils mettront plus de dix ans à se concrétiser par l’ouverture effective aux touristes.
Flaine apparaît comme une aventure humaine sans précédent dans les Alpes, un rêve de perfection, une quête radicale de la beauté.
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